Titre: Le Jardin Météorique
Année: 2004
Client: CIAV Meisenthal, Ville de Bitche
Mission: conception

 

Entre le carré bleu pur
que découpe la fenêtre
et les dix mille triangles
jaune d'or de mon ginkgo
c'est une sorte d'accord
provisoirement parfait
{Pour le cercle rouge attendre
un coucher)

 


GERARD HALLER, METEORIQUES

LE JARDIN METEORIQUE

Les enclos météoriques sont issus du désir de faire se rencontrer et de faire jouer ensemble des éléments contradictoires par leurs échelles. Rencontre et conciliation du paysage -des centaines de mètres carrés- et du verre soufflé -treize mètres carres- composés d'une volée de 170 disques de verre flottant au-dessus de soi. Le monde enclos où cette opération de réduction et de dilatation s'opère s'inspire des constructions humaines les plus simples, cabane, hutte, abri. L'intimité de ces abris de fortune protège tout à la fois de l'extérieur et en même temps laisse pénétrer et ressentir les variations climatiques naturelles.
Les couleurs de la lumière naturelle, d'une richesse inégalable, les brumes, les brouillards, les pluies (du crachin à la bourrasque) Jouent en pénétrant dans l'enclos par les disques de verre soufflé. La matière même des disques, cet élément de liquide figé trouve son accord avec l'eau en suspension dans l'air, il est réceptacle des éléments naturels et par sa transparence, concentre la lumière dans le puits. Aux disques de verre soufflé revient alors, à la manière d'un vitrail, la fonction céleste de qualifier les atmosphères de chaque enclos. Rendues aux métamorphoses naturelles météorologiques, à l'amplitude des variations de la lumière, les atmosphères changent au cours du temps qu'il fait.
Nous sommes dans un concentré enclos d'une nature rêvée, qu'il est possible d'expérimenter à notre échelle pour sentir, ressentir, parcourir nos propres émotions, celles qui nous étreignent devant le rouge flamboyant d' un coucher de soleil, du pourpre inquiétant d'un nuage, de la rousseur d'une lune ou du bleu sombre d'un crépuscule L'expérience proposée au visiteur pourrait être décrite comme un voyage à l'intérieur d'un vase où se mêlent les éléments du végétal, de l'aquatique et de la coloration venant de l'extérieur. Le visiteur devient lui-même le capteur de ce monde en miniature, il n'est pas le spectateur d'un objet ou d'une installation mais l'habitant, il est inclus dans la proposition de ces trois mondes colorés. L'enclos jaune avec son arbre artificiel duquel émerge une liane plantée de végétaux entraîne à un espace de jungle avec courbes, entrelacs et voussures. L' enclos rouge lie la terre au ciel par les plantes grimpantes qui s'élèvent et se déploient dans l'espace vide à leur disposition. L' enclos bleu propose une poétique de la rêverie de l'eau et du miroir par son bassin contenant des plantes aquatiques, eau dormante qui démultiplie l'effet coloré des disques en les réfléchissant.

 

 

 

LE PROJET VERRIER [CIAV] DE MEISENTHAL

Au milieu du XVIIIème siècle pour fabriquer du verre plat (verre à vitre), on utilisait une technique particulière... celle des disques. Cette technique est décrite dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert (1751-1771) par quelques planches de gravures (voir ci-contre). Les verriers soufflent de grosses boules de verre, qu'ils percent à leur extrémité. A la flamme du four ils chauffent cette extrémité qui ramolli alors rapidement. Ensuite en faisant tourner la canne très rapidement sur elle-même, l'extrémité de l'objet, grâce à la force centrifuge, s'ouvre (un peu comme une fleur) et se transforme en disque. Une fois refroidi, on y découpe le verre à vitre plat. A l'époque, on fabriquait des disques qui pouvaient atteindre plus d'un mètre de diamètre. Aujourd'hui encore, dans de vieilles bâtisses on peut observer des sortes d'auréoles ou stries circulaires dans les vitres: ce sont les stigmates des disques de verre dans lesquels elles ont été découpées.
L'utilisation du verre soufflé dans des projets architecturaux n'est pas chose aisée. En effet, la taille des objets soufflés traditionnellement étant fortement limitée, il est difficile de faire face aux demandes qui concernent de grands espaces. Pour créer du volume, la solution consiste à démultiplier et assembler des collections de petits éléments soufflés C'est dans cet état d'esprit que Jean-François Frering designer, a imaginé et conçu les couveuses du jardin météorique et les systèmes techniques de suspension des disques et que les services de la Ville de Bitche les ont réalisés. Ces disques ont tous été fabriqués selon la méthode traditionnelle de fabrication de verre plat.
Chaque couveuse est recouverte de 170 disques de 30 cm de diamètre.